trigger warnings
enlèvement d’enfant, expérimentations, ptsd, animal death, anxiété, panic attacks, harcèlement

identité; —
AMBER Alert
Deer Creek, OR. Child Abduction: Maxine Rajendran 4 year old female, 3' tall, 40lbs., with brown hair and brown eyes, last seen wearing a yellow pyjama CALL 503-905-3501
April 4 2001

disparue pendant quelques jours et c’était déjà assez pour retourner tout oregon sens dessus dessous, d’écumer chaque mètre carré de la ferme familiale et même d’interroger tous les prédateurs locaux. et puis on l’a retrouvée dans un champ, portant toujours le même pyjama jaune hello kitty, sans un cheveu de travers. la panique aurait dû s’arrêter là mais il a fallu que les journalistes locaux s’emparent d’une information confidentielle pour que tout deer creek soit au courant: elle a été enlevée par des aliens. et juste comme ça maxine rajendran, après avoir massacré son nom un million de fois, est devenue the alien girl.

age, date et lieu de naissance; — 10 octobre 1997, à aster farm (deer creek).

nationalité; — américaine avec tout le bagage raciste que ça implique. maxine subit en silence mais mémorise les noms des personnes qui ont causé du tort à elle ou sa famille. elle n’a pas le courage de sa soeur pour se défendre, elle sait juste que karma is a bitch et que les racistes prendront cher tôt ou tard.

situation familiale; — suffocante. des parents et des soeurs ainées qui la surprotègent. avant, elle n’avait même pas le droit de sortir sans être accompagnée. ses parents lui ont donné plus de libertés quand elle a eu vingt-et-un ans mais avec une condition: qu’elle donne de ses nouvelles régulièrement. maxine est okay avec leurs règles, de toute façon, elle aime sa famille plus que tout, elle ne veut pas quitter la ferme trop longtemps, ça lui procure une certaine sûreté qu’elle ne veut pas perdre. mais parfois—parfois, quand elle a envie d’être juste max, sa situation lui donne envie de hurler. sauf qu’en guise de réponse à ses hurlements il n’y a que l’écho de ses propres pensées.

emploi; — à aster farm y’a une variété de jobs et maxine aime pouvoir jongler entre différentes activités. elle aime cultiver la terre, cueillir les fruits et légumes pour ensuite rouler la camionnette en ville et les revendre aux supermarchés locaux. elle aime s’occuper du poulailler et des vaches même si elle ne consomme rien qui provient d’un animal. elle aime s’occuper des alpagas et des llamas. la ferme a même un partenariat avec les écoles locales pour des visites et maxine aime se charger de ce boulot aussi, elle aime apprendre aux gosses les joies et difficultés d’entretenir une ferme.

situation financière; — dans la moyenne.

situation amoureuse et orientation sexuelle; — y’a toujours eu des doutes mais jamais le temps d’explorer l’idée qu’elle n’est peut-être pas straight. de toute façon, avec la surprotection de sa famille et de son refus d’explorer une romance, elle a juste laissé l’idée mourir avant même qu’elle ne germe complètement. puis, a ses vingt-et-un ans, ses parents lui ont accordé plus de libertés et max—elle a fait un tour dans les bars et les clubs. au départ trop timide, elle refusait d’aborder quiconque et ne répondait pas non plus aux avances, préférant observer et trouver son virgin cocktail favori. puis un jour, elle a eu le courage de rejoindre la piste de danse et quand leurs regards se sont croisés, c’est comme s’il n’y avait qu’elles et personne d’autre. le picotement dans ses doigts quand elle lui a touché l’épaule dénudée, les lèvres de l’autre fille contre sa gorge, son doigt qui s’accroche a la boucle de son pantalon. max lui a donné son coeur et son numéro mais elle ne l’a jamais rappelée.  

signes distinctifs; — aucun en temps normal. mais certains soirs, quand elle s’éclipse par la fenêtre sans prévenir personne pour aller dans un club, elle porte une perruque rouge qu’elle agrémente d’une couronne de fleurs. les mèches rouges tombent sur ses épaules, sa robe florale plus courte que ce qu’elle porte habituellement. la perruque, c’est comme un bouclier, pour un court moment elle prétend être quelqu’un d’autre.

caractère; — débrouillarde, bosseuse, agile, calme, anxieuse, réservée, routinière.

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livre préféré : the bluest eye (toni morrison).
film préféré : my neighbor totoro (1988).
dernière chanson jouée : joyride, tinashe.
dernier sms envoyé : “what's instagram” à nova.
dernier repas : kibbeh vegan.
personne à contacter en cas d'urgence : ses parents et ses soeurs.
commande typique au diner du coin : le seul plat vegan du menu.
contenus de son sac : un pepper spray, un stock de factures, une switchblade, un bloc-notes.
contenus de sa table de chevet : une veilleuse hello kitty qui a plus de vingt ans et ne fonctionne pas.
endroits fréquemment visités : le centre ville.
endroit préféré : aster farm, la ferme familiale. l'espace
quel genre d'ami.e c'est : Read 10:29 AM.
un porte-bonheur : la marque qu’elle a sur sa nuque: trois traits verticaux, légèrement en relief.
un rituel/une tradition : toucher du bout des doigts la marque sur sa nuque pour se rassurer qu’elle est toujours là, que ce qu’elle a vécu n’était pas un rêve.
un rêve : qu’ils reviennent.
une peur : qu’ils reviennent.

un souvenir : 2002. ses pas de gamine excitée foulent le champ parsemé de mille fleurs, tentant d‘échapper aux crocs-en-jambe du chien familial. sa mère hurle ne va pas trop loin! et son père demande à stella de la surveiller vite vite, avant qu’elle n’aille trop loin. et puis en un battement de cils, stella est à ses côtés. maxine lui attrape la main et la guide dans le champ, écartant les branches qui tentent de s’accrocher à sa robe. ça fait un an depuis son enlèvement et ses parents ont décidé de faire un pique-nique près d’un lac pour profiter du beau temps. les rayons du soleil font écho à d’autres rayons lumineux, plus sinistres mais maxine ne perd pas son sourire. pas encore. main dans la main, les soeurs continuent leur traversée parmi les fleurs, leurs mains libres s’accrochant aux pétales roses que le soleil embellit. et puis, subitement, maxine s’arrête, le regard rivé au sol. il y a une petite zone, là, dans la glèbe, avec des fleurs fanées. et en son milieu, des corbeaux tombés qui forment un cercle. ils ne bougent plus. elle relève la tête et le soleil a disparu, emportant avec lui les dernières traces de son sourire. l'obscurité recouvre le champ d'une peinture pigmentée d’aniline. maxine tire sur la main de sa soeur pour lui montrer le cercle. “dis, stella. pourquoi ils ne bougent plus?” mais stella ne répond pas tout de suite, elle jette un regard en biais vers leurs parents en train d’aider mamie à sortir de la voiture pour le pique-nique. puis le regard de stella revient sur elle et après un haussement d’épaules, répond: “je sais pas- je pense qu’ils sont morts?” mais maxine ne comprend pas—elle imite leur chienne et sa tête bascule sur le côté. “c’est quoi être mort? un nouveau travail?”

“non, la mort c’est pas un travail. c’est un long voyage, je crois, dont personne ne revient. le coeur arrête de battre. c’est triste.” maxine ne sait absolument rien sur la mort. elle a grandi dans une bulle et le restera toute sa vie—même les êtres d’un autre monde n’ont pas réussi à l’extraire de sa bulle. maxine ne comprend pas. son monde chavire, le ciel est toujours aussi sombre. et stella ne semble pas avoir remarqué l’obscurité. “la mort, c’est nul.” qu’elle conclut, simplement, le regard qui tombe sur les corbeaux morts. “c’est trop compliqué pour nous, la mort. on est encore des enfants. et puis les enfants, ça ne meurt pas très bien, je crois. c’est comme si tu faisais nager un oiseau ou voler un poisson! alors faut pas t’en faire. je laisserai personne t’emmener vers la mort.” dans cette aquarelle en noir et blanc, maxine pose une main sur le coeur de sa soeur et compte les battements. les enfants ça ne meurt pas très bien. mais les enfants disparaissent sans laisser de traces. “mon coeur bat, le tien aussi. maman m’a dit un jour que quand on meurt, y’a ton ‘âme’ ou ta rame, je sais plus très bien, qui quitte ton corps. en gros, c’est ta rame qui permet à ton corps de naviguer, c’est pour ça qu’on met les morts dans les boîtes. la mort, c’est pas très joli. tu n’entends personne, tu ne peux pas non plus remercier les personnes qui t’ont offert des cadeaux. mourir, c’est perdre ta rame, max.” les corbeaux sont toujours là, sans vie, toujours dans un cercle. “et mamie? sa rame est fragile…” la main de stella dans la sienne lui procure une certaine chaleur, contraste brusque avec l’environnement froid et la froideur des corbeaux. plus que les rayons du soleil n’ont réchauffé son corps, les mots de stella permettent à son esprit d’accepter la mort. ce n’est pas une fatalité mais un voyage dans un bateau, une continuité logique, une aventure dans un autre monde. “c’est pour ça qu’on est là, pour protéger sa rame.” mais pour le moment, elles n’ont pas à penser à ce voyage, elles sont encore là, vivantes, leur mamie aussi, alors les couleurs s’interposent sur le tableau devenu momentanément monochrome. y’a du jaune et du bleu sur sa soeur, du rose et du blanc sur elle-même. elles sont vivantes. les images s'effacent, la peur s'essouffle. soufflé, tout, pour toujours. la vie reprend son cours. 

quelques heures plus tard, sur le chemin du retour, la famille affronte un orage. la tête contre la vitre de la voiture, maxine repense aux corbeaux: c’était comme un mauvais présage.

endlessness runs in you like leaves on the tree of night

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elle dort toujours avec la tv allumée mais uniquement sur une chaine statique, il n’y qu’avec les bruits blancs qu’elle arrive à trouver sommeil. parfois, ça lui arrive de se réveiller au beau milieu de la nuit pour fixer la tv, avec l’impression morbide que quelqu’un ou quelque chose essaye de communiquer.

sa chambre est toujours celle de son enfance, elle refuse le moindre changement—tout doit rester comme c’était. que ça soit le papier peint fleuri ou bien la veilleuse hello kitty qui ne fonctionne pas. pour maxine, le fait de garder sa chambre intacte va permettre aux aliens de mieux la retrouver.

elle ne sait pas comment ni pourquoi mais depuis son enlèvement, elle voit des animaux mourir. si c’était juste un seul elle ne s’y attarderait pas plus mais c’est toujours un petit groupe d’animaux formant un cercle. elle s’est mise à photographier les animaux morts et noter dans un journal le jour des apparitions même si elle ne sait pas ce que ça signifie.

à cause du harcèlement scolaire, elle a été homeschooled au collège. ça lui a permis de mieux se focaliser sur la ferme et de développer une passion pour ce travail, avec toutes les difficultés que ça implique. elle ne regrette pas son choix de ne pas avoir poursuivi des études supérieures—aster farm est sa vie.

elle a une routine pour absolument tout, sans routine, elle serait complètement perdue et sa journée serait foutue. la routine lui permet de tenir l’imprévisible à distance—elle déteste plus que tout l’imprévisible, quand quelque chose est hors de son contrôle, elle déraille. elle déteste aussi le désordre, il n’y a pas un livre mal-placé dans sa chambre.

parfois, dans des moments random, elle se perd dans ses souvenirs et revit son enlèvement: elle se rappelle avoir joué avec une balle lumineuse. elle se rappelle que ses pieds ne touchaient pas le sol. elle se rappelle d’une pièce blanche et des symboles qui apparaissent et qu’elle doit compléter avec son corps. elle se rappelle qu’elle a ri, joué avec les créatures et puis beaucoup pleuré parce que sa famille lui manquait. elle se rappelle qu’à chaque fois qu’elle faisait quelque chose, les créatures l’observaient; à l’époque les médecins avaient conclu qu’elle avait subi des expérimentations mais lesquelles? dans quel but? le gros point d’interrogation sur son dossier est rouge mais personne n’a les réponses à part eux. de toute façon, personne ne la croit.